
Coup de gueule contre les langoustines de la presse et la troupe vociférante de lecteurs-pagures.
Un petit témoignage de l'emprise du fric sur l'information, particulièrement sportive, et l'armada d'aficionados aux esgourdes stériles à la vision parcimonieuse et au mucus dégoulinant.
Vous savez comme il est redondant de voir au moindre titre Européen ou Mondial de nos valeureux footballomanes ou rugbypèdes une noria de bavasseurs nous rendre compte ad vomitam jusqu'à la marque du slip des interférants ou à l'âge de leur artériosclérose.
Mais comme dit une humoriste qui possède un sens inné des réalités vraies, véritables et vérifiables, "on ne nous dit pas tout".
D'abord une question : connaissez-vous Mios ? Ou Biganos ?
Non ce ne sont pas des îlots aux sabots d'Hélène, loin du vacarme hautement actuel, loin de la mer Égée et du paradis de la moussaka, nous sommes dans deux petites villes Girondines. Villes de si peu d'importance sur une carte Michelin qu'elles doivent mettre en commun leurs ressources pour être visibles chez Bibendum et pour entretenir un club de Hand-ball.
Un tout petit club autour d'une famille, né en 1970, pas de ceux dont on fait une encyclopédie ou un almanach vermoulu, non un petit club, bien remuant, à l'image de son équipe première féminine et pour une si jeune structure,
un palmarès étonnant.
Là nous ne sommes pas au PSG ou chez les SPOUNTZ de Big-nose / California, nous côtoyons les ostréiculteurs du bassin d'Arcachon, les pins maritimes et les chenilles processionnaires. On y fréquente plus souvent les pare-feu pour se rendre à l'école que les routes secondaires, on a plus de chance d'y rencontrer maître sanglier que maître Collard. Et pourtant, envers et contre tout, surtout la loi du pognon qui fit rétrograder récemment deux autres très grands clubs du département en division 2, nos Miossaises tiennent la barre, la très grande barre, pas de ces petits trophées de pacotille-plastique qu'on donne aux enfants pour les encourager, non, non... dimanche 15 mai 2011, elles sont devenues Championnes d'Europe.
Si si, n'écarquillez pas les yeux, je vous jure, il y a au fin fond du plus grand département de France, perdue entre landes et océan, noyée sous le sable et le soleil, une équipe CHAMPIONNE d'EUROPE, mais qui l'eût cru ?
Sans doute que le titre n'est pas assez porteur pour paraître à la une, sans doute que cette équipe de briques et de brocs n'est pas à la hauteur des cachets de quelques journalistes télévisuels, sans doute qu'une seule équipière de France ne vaut le déplacement, un gaspillage d'encre ou l'usure d'une caméra. Sans doute que ce titre n'est pas le plus prestigieux, les scribouillards nous dirons que c'est un accident, qu'il y a mieux dans notre pays, vous savez ces clubs qui roulent sur l'or, qui voyagent première classe et consomment caviar, ces clubs qui se paient à millions mercenaires et stages techniques, pourtant malgré les tempêtes dévastatrices, les fifrelins qui rentrent au compte-goutte, les départs alléchés vers d'autre cieux, elles sont au sommet, pas l'Everest, sûr, mais le K2. Cela ne mérite-t-il pas mieux qu'un
entrefilet de cinq lignes dans la presse nationale spécialisée ?
Cinq lignes, de quoi ruiner toute volonté, le dédain du gratin pour la plèbe, une insulte à la raison, une envie parfois de mettre son pied où il est mérité lorsqu'on se souvient du carnage audiovisuel et journalistique de la débâcle footballistique mondiale et des milliers de lignes, centaines d'articles, dizaines d'interventions ministérielles et demi-douzaine de commissions pour ne rien changer.
Je me souviens d'une affiche, il y a peu, sur laquelle beaucoup ont débattu de telle ou telle symbolique, qu'ils ne s'inquiètent pas, à Mios-Biganos, elles jouent au Hand-ball et non à dégoiser sur la longueur du short ou la hauteur de talons présents sur les affiches... elles n'en ont pas... d'affiche, et malgré tout, n'en déplaise aux collets montés, aux braguettes crispées, aux stylos mal embouchés, elles sont CHAMPIONNES d'EUROPE...
Emile Red